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Assurance-maladie des travailleurs frontaliers (suite)

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L’article de Mme Jacqueline Deck paru dans le dernier numéro de La lettre a, comme prévu – s’agissant d’un domaine réglementaire en pleine mouvance, c’est bien normal – fait naître des questions auxquelles Mme Deck répond ci-dessous. Pour mémoire, dans le domaine de l’assurance-maladie, la notion de frontaliers couvre également les Suisses établis en France, mais travaillant en Suissse. (réd.)
Exercice du droit d’option : Un patient franco-suisse me demande s’il peut conserver son assurance de base LAMal tout en allant résider en France voisine pour sa prochaine retraite ?
Dans le cadre des Accords bilatéraux, le changement de lieu de résidence (de la Suisse à la France dans cas présent) et le changement de statut, en particulier celui du passage à la retraite, ouvrent un nouveau droit d’option pour s’assurer en France ou en Suisse.
Attention toutefois et ceci est important : la possibilité de rester assuré en Suisse n’existe que si l’assuré perçoit une rente de la Suisse exclusivement. Une prestation aussi minime soit-elle du pays de résidence entraîne l’obligation de s’assurer dans ledit pays, soit à la Sécurité sociale française.
Si la possibilité d’opter pour l’assurance-maladie suisse est acquise, il faut encore voir si sa caisse-maladie pratique l’assurance dans tous les Etats membres de l’UE ou de l’AELE. On peut trouver la liste y relative sur le site du service l’assurance-maladie Genève à la rubrique «Accords bilatéraux». Voilà pour l’assurancemaladie sociale.
Concernant éventuellement les assurances complémentaires, il faut se renseigner auprès de son assureurmaladie pour savoir s’il offre ce genre de produits à l’étranger. Le cas échéant, un assuré peut perdre ses assurances complémentaires.
Tarif TARMED ou Tarif Sécurité sociale ? Pour quelles prestations la Sécurité sociale française rembourse- t-elle sur une base TARMED ou sur une base Sécurité sociale ?
Il est vrai que l’enjeu de l’accès aux soins en Suisse des frontaliers et de leurs ayants-droit et des rentiers au bénéfice d’une rente suisse exclusivement est la base des remboursements de soins, TARMed ou Sécurité sociale.
Du côté des fournisseurs de prestations suisses, quel que soit le cas de figure (soins urgents, soins nécessaires programmés, certains soins initiés avant l’échéance du contrat privé, etc.), ces derniers doivent établir leurs factures selon le tarif applicable dans le pays de soins, c’est-à-dire la Suisse. C’est la Sécurité sociale qui, selon la catégorie de soins, effectue un remboursement sur base du TARMed ou de la Sécurité sociale.
Prise en charge des soins ayant débuté en Suisse avant l’échéance du contrat privéJe suis confrontée à une jeune patiente en psychothérapie qui est en plein traitement qui va s’interrompre fin avril alors que son médecin traitant a soutenu par un rapport l’importance de la poursuite, ceci d’autant qu’on manque de psychothérapeute d’orientation analytique en France voisine. La réponse de la Sécurité sociale est négative et même si ma patiente est prête à participer financièrement, ce n’est juste pas jouable avec son salaire. Ma patiente a tenté toutes sortes de démarches auprès d’assurances privées mais sans succès. Cela crée vraiment des situations assez dramatiques et sans solutions il faudra que nous travaillions à 30% du tarif suisse, et encore, pour éviter des catastrophes.
Cette situation pose le problème de la prise en charge des soins initiés, c’est-à-dire de la prise en charge par la Sécurité sociale française des soins débutés en Suisse et pris en charge jusqu’à présent par une assurance privée. En l’état actuel de la législation, il faut distinguer deux cas en particulier: les soins lourds en rapport avec une affection de longue durée et les soins lourds sans rapport avec une affection de longue durée. La Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) a établi une liste des affections de longue durée comme le diabète ou le cancer. S’il s’agit d’une de ces maladies, le médecin traitant doit prendre contact avec le médecin-conseil de la CPAM qui donnera en principe son accord pour que les soins puissent être poursuivis en Suisse pour une période convenue en fonction de la pathologie. La prise en charge se fera sur la base des tarifs suisses.
Quant aux soins qui n’ont pas de rapport avec une affection de longue durée, c’est le médecin-conseil qui jugera de la pertinence de poursuivre les soins en Suisse.
Enfin, pour les soins initiés non lourds, ils pourront être pris en charge pour les frontaliers mais sur la base des tarifs français. C’est un des points obtenus lors des négociations qui garantit au frontalier une prise en charge partielle des coûts pour des soins qui pourraient être réalisés en France.
Il est clair que les règles posées par la législation en l’état actuel des choses risquent de poser des problèmes, en particulier pour les psychothérapies et peut-être certaines maladies chroniques. Le patient devra participer aux frais non couverts.
A ce jour, j’avoue ne pas voir de solutions si ce n’est une évolution de la législation compte tenu des négociations encore en cours.
Convention France (CPAM) – Suisse (médecin traitant) : Un frontalier peut-il choisir son médecin traitant en Suisse ? Existe-t-il une convention générale ou une convention type que le médecin suisse pourrait avec la Sécu ?
La signature de l’Accord organisant les rapports entre les médecins établis dans un autre Etat membre de l’UE/EEE/Suisse/Monaco et l’assurance maladie française (régime général) se fait de cas en cas lorsqu’un patient/assuré fait le choix de son médecin traitant en Suisse. On ne peut signer ledit accord de façon générale. Il faut encore savoir que, dans une telle situation et selon les renseignements que j’ai obtenus de la Sécurité sociale française en l’état actuel de la législation (qui peut évoluer), le médecin traitant suisse choisi établit sa facture selon le TARMED alors que le patient est remboursé sur une base Sécurité sociale (hormis les cas d’urgence et les cas de soins nécessaires programmés en Suisse). En fait, en signant un tel accord, le médecin traitant suisse s’engage à suivre le dispositif du parcours de soins coordonnés mis en place par l’assurance-maladie française.
Jacqueline Deck, juriste